Le cube “Maggi”, le tueur silencieux en Afrique

Dans les années 50, l’ingrédient devant révolutionner les plats culinaires s’installe dans les ménages africains. Aujourd’hui, les bouillons Maggi sont des tueurs silencieux.

Il a colonisé toutes les assiettes presque de l’Afrique et au omniprésent sur le continent. Le cube Maggi est un ingrédient prisé pour les plats culinaires dans les ménages.

Selon les rapports, plus de 100 millions de cubes sont vendus chaque jour en Afrique et entre 70 à 80% des ménages de l’Afrique l’Ouest et du Centre en consomment régulièrement. Le marché ouest-africain des bouillons industriels pesait 375 millions de dollars en 2016, avec 65 milliards de cubes vendus cette année-là. En Côte d’Ivoire, par exemple, le chiffre d’affaires annuel du marché des bouillons cubes est estimé à 90 milliards de francs CFA.

Si à l’origine, il s’agissait d’un concentré déshydraté de bouillon de viandes ou de volailles, de nos jours, depuis que l’industrie agro-alimentaire a mis la main sur ces petits cubes, la recette originelle a beaucoup changé. C’est désormais un pur produit de l’industrie agro-alimentaire et ces bouillons-cube sont plutôt un concentré industriel contenant beaucoup de sel, des exhausteurs de goût, du sucre et divers additifs. En résumé, des ingrédients qui nuisent dangereusement à la santé humaine. 

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La haute teneur en sel de ces cubes est donc un facteur aggravant d’hypertension, de maladies cardiovasculaires et d’insuffisances rénales. L’hypertension connaît une forte prévalence en Afrique. Outre le sel, la présence de nombreux additifs (glutamate, colorants, etc.) et du sucre (via le sirop de glucose) favorise la prise de poids, les inflammations et des perturbations endocriniennes. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a mis en garde contre la teneur élevée en sodium et certains composants allergènes, pouvant contribuer à des maladies non transmissibles (AVC, cancers).

“Tout est lié à l’iode contenu dans ces produits et le sel (NaCl)”, soutient Dr Abdoul Razak Moussa, spécialiste en biochimie, nutritionniste diététicien à Niamey, Niger. Pour le spécialiste, la consommation des bouillons cubes entraîne une surcharge ou un excès en iode et en sodium dans l’organisme. D’où la perturbation des hormones thyroïdiennes et des anomalies fonctionnelles cardiaques. Et face à ces nombreux risques, des acteurs locaux militent et recommandent vivement le retour aux épices naturelles. 

Mais face aux accusations, le groupe Nestlé, société qui fabrique surtout les cubes Maggi s’est justifié lors d’une conférence de presse tenue en 2021. Nestlé a insisté sur le fait que « tous les ingrédients utilisés dans les cubes Maggi sont approuvés par les autorités réglementaires ». L’entreprise affirme avoir mis en place « un système de qualité rigoureux » pour garantir la sécurité des produits à chaque étape du processus, depuis les matières premières jusqu’au produit fini. D’après Nestlé, les produits Maggi subissent « plus de 400 contrôles qualité » durant la fabrication. L’entreprise a souligné que la qualité nutritionnelle des cubes Maggi évolue vers des formulations plus adaptées, notamment en réduisant le sel et en enrichissant certains produits avec du fer et d’autres micronutriments. Lors de cette communication, Nestlé a notamment évoqué des campagnes comme “Une Santé de FER”, et son engagement à mobiliser la population (notamment les femmes) pour une alimentation plus équilibrée et saine.

Au Cameroun par exemple, selon les statistiques, 6 enfants de moins de 5 ans sur 10 sont atteints d’anémie. Bien plus, 40% des femmes de 15 à 49 ans souffrent d’anémie et la consommation des bouillons Maggi ne sont pas totalement exemptés des causes. C’est d’ailleurs pour cela que le groupe Nestlé, lors de sa conférence de presse en octobre 2021, a insisté sur la campagne “Santé de fer” afin de prôner davantage la consommation du fer dans les alimentations.  

Toutefois, face à des critiques sur la présence d’additifs chimiques et de taux élevés de sel, Nestlé a réaffirmé que ses produits respectent les normes internationales. Cependant, plusieurs audits internes ont montré que plus de 60% de ses produits alimentaires ne sont pas considérés comme “sains” selon ses propres standards, ce qui a généré un débat au sein du public et des associations de consommateurs. 

Des documents internes ayant fuité en 2021 révèlent aussi que la qualité nutritionnelle des gammes vendues en Afrique reste souvent inférieure à celle commercialisée en Europe, en raison d’une composition différente et d’une préférence pour les ingrédients bon marché pour le marché africain.

En date, le Sénégal est le seul pays africain ayant imposé une réglementation sur la teneur en sel (plafond à 55%) dans les bouillons alimentaires depuis 2017. C’est le premier pays d’Afrique de l’Ouest à avoir instauré ce type de réglementation. Cette limite équivaut à environ 22 000 mg de sodium pour 100 g de bouillon sec. En complément, le Sénégal a également instauré une taxe de 25% sur la vente des cubes alimentaires en 2021, dans le but notamment de réduire la consommation et de répondre aux problèmes de santé publique liés à ces produits.

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L’Afrique du Sud a adopté des lois concernant la teneur en sodium dans les aliments transformés, fixant des niveaux maximaux de sodium en-deçà de 13 000 mg pour 100 g dans certains produits alimentaires, mais il n’est pas spécifiquement mentionné une réglementation ciblant uniquement les bouillons alimentaires.

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Pour préserver la santé, Dr Abdoul Razak Moussa encourage vivement la consommation des arômes bio comme la spiruline, très riche en fer et en protéines ou encore des bouillons des légumes en poudre qui sont bénéfiques pour notre santé.

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