« Il ne peut y avoir de justice climatique sans égalité des sexes ». Ces mots, prononcés par la militante ougandaise pour le climat, Vanessa Nakate, font écho à une vérité que nous ne pouvons plus nous permettre d’ignorer.
En Afrique, où les impacts du changement climatique se font le plus durement sentir, les femmes sont au cœur de la lutte, non seulement en tant que victimes, mais aussi en tant qu’agents du changement. La question n’est plus de savoir si les femmes ont leur place à la table des négociations. La vérité est qu’ils ont toujours été là, tenant la table elle-même.
Le Groupe Africain d’Appui aux Experts Négociateurs (AGNES) reconnaît cette réalité indéniable et a pour mission de donner aux femmes la place qui leur revient dans la gouvernance climatique. En collaboration avec le Groupe de la Banque africaine de développement, le Fonds africain de développement (FAD) et le Fonds d’investissement climatique (CIF), AGNES a lancé le programme d’autonomisation des femmes dans la gouvernance climatique, une initiative révolutionnaire qui a rassemblé 10 femmes leaders influentes de toute l’Afrique.
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Ces femmes sont Helene Uzayisenga (Rwanda), Beverly Mishili (Zambie), Susan Nanduddu (Ouganda), Namo Lawson (Togo), Eman Abdelazam (Egypte), Anne Omwoyo (Kenya), Nour Mansour (Tunisie), Karishma Ansaram (Maurice), Dr. Joyce Ogwezi (Nigéria) et Afia Agyapomaa Ofosu (Ghana). Elles se sont réunies à Nairobi, au Kenya, non seulement pour apprendre, mais aussi pour diriger. Le rassemblement a été un moment primordial de partage de connaissances, de réseautage entre pairs et d’autonomisation mutuelle. Il envoie un message clair : les femmes ne contribuent pas seulement à la lutte contre le changement climatique ; elles sont le combat.
Le changement climatique est une crise de genre
L’Afrique est à la première ligne de la crise climatique, et les coups sont incessants. Le rapport 2023 sur l’état du climat en Afrique dresse un tableau désastreux : les événements météorologiques extrêmes – inondations, sécheresses, hausse des températures et modification des régimes de précipitations – ravagent les économies, dévastent les écosystèmes et aggravent les inégalités. Les tempêtes ne frappent pas seulement les côtes ; elles déracinent des vies, notamment celles des femmes.
Lorsque les inondations reculent et que les sécheresses tombent en poussière, ce sont les femmes qui ramassent les morceaux. Mais voici le problème : bien qu’elles supportent le plus lourd fardeau du changement climatique, les femmes continuent d’être marginalisées dans la prise de décision. Ils sont exclus des salles où les politiques sont rédigées, les budgets sont alloués et les stratégies sont conçues – des salles où leurs idées sont désespérément nécessaires.
Pensez-y : d’ici 2030, on prévoit que 118 millions de personnes en Afrique seront confrontées à des risques accrus en raison des conditions climatiques extrêmes. La majorité d’entre elles seront des femmes. Pouvons-nous, en toute bonne conscience, continuer d’exclure ceux-là mêmes qui souffriront le plus de cette crise ?
Les inégalités sont profondes. Les femmes, qui représentent plus de la moitié de la population africaine, se voient systématiquement refuser le pouvoir d’influencer les systèmes mêmes qui perpétuent leurs vulnérabilités. Ils sont exclus du pouvoir politique et économique et sont contraintes de fonctionner avec un accès limité aux ressources financières, à l’éducation et aux services de base. L’écart entre ceux qui subissent les impacts du changement climatique et ceux qui ont le pouvoir d’agir se creuse de jour en jour.
Est-il juste que, pendant que les femmes africaines peinent à s’adapter au changement climatique, elles soient exclues des processus de gouvernance qui pourraient améliorer leur vie ? Absolument pas.
Un appel aux femmes africaines pour qu’elles prennent les devants
Lors de l’atelier d’intégration de Nairobi, le chef d’équipe d’AGNÈS, le Dr George Wamukoya, a lancé un appel à l’action qui a résonné dans toute la salle : Le genre est très important dans la gouvernance climatique car il est essentiel. Le Plan d’action pour l’égalité des sexes a pris fin et l’Afrique en a besoin d’un nouveau. C’est le moment pour les femmes africaines d’apporter leur contribution.
Pour le docteur, ses mots ont frappé comme des marteaux. Ils ont forcé à réfléchir à la situation de mon propre pays, le Ghana, où l’exploitation minière illégale (Galamsey) fait des ravages dans les communautés locales. Les rivières sont assombries par la pollution, le sol est dépourvu de vie et pourtant le silence de nos dirigeants est assourdissant. Les femmes et les enfants paient le prix le plus élevé, et personne n’est tenu pour responsable.
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Que faudra-t-il pour que nos dirigeants se réveillent et réalisent le prix de leur inaction ? Le temps d’attente est révolu. Il faut exiger mieux. Nous devons exiger un avenir dans lequel les voix des femmes ne seront pas seulement entendues mais aussi privilégiées. Les femmes comme celles du programme AGNES prouvent qu’elles possèdent les connaissances, la résilience et la passion nécessaires pour mener la charge. Ils ouvrent la voie à un avenir où justice climatique et égalité des sexes vont de pair.
Nous ne pouvons pas continuer à remettre les pendules à l’heure en espérant que quelqu’un d’autre s’en chargera. Tout retard dans l’action est une condamnation à mort pour les moyens de subsistance de quelqu’un, pour la communauté de quelqu’un, pour l’avenir de quelqu’un. Il est grand temps que nous réalisions que l’autonomisation des femmes n’est pas seulement une étape vers la justice climatique : c’est le seul moyen d’y parvenir.
Il est temps d’agir maintenant
Alors, que se passe-t-il ensuite ? Allons-nous continuer à exclure ceux-là mêmes qui peuvent proposer de vraies solutions, ou allons-nous enfin prendre la décision audacieuse de placer les femmes au centre de la gouvernance climatique ? Les femmes rassemblées à Nairobi sont prêtes à prendre les devants ; la question est : sommes-nous prêts à suivre ?
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Car une chose est sûre : on ne peut résoudre la crise climatique sans s’attaquer aux inégalités profondément enracinées qui l’alimentent. Les femmes ne sont pas une considération secondaire dans ce combat ; elles sont le battement de cœur. Et si nous voulons avoir le moindre espoir de gagner, nous devons leur donner les moyens d’agir – pas demain, ni dans le prochain plan d’action climatique, mais maintenant.
L’horloge tourne. Les tempêtes arrivent. Mais si les femmes montrent la voie, nous avons une chance de les surmonter ensemble.
Par: Afia Agyapomaa Ofosu
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