Plus de 69% des femmes victimes de violences de tout genre au Bénin

La lutte contre les violences à l’égard des femmes au Bénin peine toujours à endiguer ce mal de société malgré l’arsenal juridique en vigueur dans le pays. Dans une étude du ministère de la famille, plus de 69% des femmes disent avoir subi de violence une fois dans leur vie.

Les statistiques sont inquiétantes et les victimes – les femmes – se retrouvent presque impuissantes face à un fléau sociétal qui donne même du fil à retordre aux dirigeants.  Au compteur de ces violences, les abus sexuels, les viols, les injures entre partenaires, les menaces de divorce, les châtiments corporels et autres. Ces actes sont des faits graves qui impactent l’ensemble du parcours de vie de ces femmes. En somme, ces violences englobent les souffrances physiques et mentales à l’égard de cette catégorie sociale. 

Dans une étude commanditée par le ministère de la famille, des handicapés et des personnes du troisième âge, sur une population de 52% de femmes béninoise, 69% ont déclaré avoir subi des violences au moins une fois dans leur vie. 51,5% ont subi au moins une fois dans leur vie des souffrances physiques ou morales. Et suivant cette étude, ces souffrances subies sont les cris sur la femme (72,8%) ; les menaces de divorce (32,8%) ; le refus de manger ce que la femme a préparé (30,9%) ; les plaintes du comportement de la femme à la belle mère (26,9%) ; les injures à la femme devant les étrangers (22,6%) ; les violences sexuelles (28,5%) ; le viol de filles de 2-14 ans (1,4%) ; le rapt (8,5%) et l’excision (15,0%). 

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Face à des données aussi préoccupantes, l’Etat béninois a mis en place un arsenal juridique afin d’endiguer ce mal sociétal. L’Assemblée nationale du Bénin a joué sa partition avec la légifération des textes nécessaires. Les efforts des Organisations de la société civile (OSC) avaient du plomb dans l’aile face à certaines dispositions législatives inexistantes. Et pour corriger le tir, l’exécutif béninois a corsé les textes afin que les femmes se sentent véritablement libres et indépendantes pour le développement du pays.

De l’arsenal juridique

La prévalence de l’acte et la réticence des auteurs de violences sur les femmes ont contraint le gouvernement béninois à mettre en place les dispositifs législatifs. En plus de la loi N°2011-26 du 09 janvier 2012, portant prévention et répression des violences faites aux femmes, l’Assemblée nationale a adopté, fin 2021, de nouvelles loi pour renforcer l’arsenal déjà existant. 

Désormais, une nouvelle loi réprime plus durement les violences sur le genre au Bénin. Il s’agit de la loi N°2021-11 du 20 octobre 2021 portant mesures spéciales de répression des infractions commises à raison du sexe et de la protection de la femme en République du Bénin. Cette loi considère désormais le viol et d’autres abus de délits et la Cour de répression des Infractions économiques et du terrorisme (CRIET) est l’instance devant s’occuper de ces cas. 

[penci_blockquote style= »style-2″ align= »none » author= »Loi N°2021-11 du 20 octobre 2021″ font_weight= »bold » font_style= »italic »]Le viol sera puni de la réclusion criminelle à temps de dix (10) ans à vingt (20) ans et d’une amende de un million (1000.000) à cinq millions (5.000.000) FCFA, lorsqu’il aura été commis soit sur une personne particulièrement vulnérable à raison d’un état de grossesse, d’une maladie, d’un handicap ou de l’âge, soit sur une personne se trouvant dans un lien de subordination professionnelle, ou en situation de demande d’un emploi ou d’un service public, ou sur son apprenant par un enseignant ou un formateur, ou sous la menace d’une arme, soit par plusieurs auteurs ou complices.[/penci_blockquote]

De lourdes peines qui devraient dissuader les violeurs et autres acteurs qui s’investissent dans les violences à l’égard des femmes en République du Bénin. Et en plus de ces lois, l’Assemblée nationale a également doté le pays de la loi modifiant et complétant la loi N°2003-04 du 3 mars 2003 relative à la santé sexuelle et la reproduction au Bénin. Cette dernière autorise désormais l’avortement jusqu’à 12 semaines de grossesse. La loi N°2006-19 du 5 septembre 2006 s’occupe de la répression du harcèlement sexuel et protection des victimes en République du Bénin. 

L’acte final du gouvernement béninois est la mise en place de l’Institut national pour la promotion de la femme qui constitue la partie civile de ces victimes devant la CRIET. Cet institut, dans sa nouvelle configuration, est un organisme public doté de la personnalité juridique, de l’autonomie financière et de prérogatives importantes pour mener des actions plus déterminantes en faveur de la femme. L’institut lutte également contre toutes formes de discrimination à l’égard de la femme.

La culture du silence

“Malheureusement, les textes seuls ne suffisent pas”, affirme Nellie Dodjinou, journaliste et juriste à Crystal News, une web radio émettant depuis le Bénin. Pour elle, la société béninoise est façonnée et il est difficile, voire très compliquée, pour une victime de dénoncer son harceleur et d’aller devant les juridictions pour une sanction à l’égard de cette personne. Si ce n’est pas un ami, c’est un parent, c’est une connaissance et la famille, une fois impliquée, ne souhaite qu’un règlement familial.

[penci_blockquote style= »style-2″ align= »none » author= »Nellie Dodjinou, journaliste et juriste de formation » font_weight= »bold » font_style= »italic »]Il faut désormais mettre les enfants en alerte maximale et leur apprendre qu’ils ne doivent pas fréquenter des gens n’importe comment. La culture du viol commence par là. Et ne pas le faire à temps, ce sera trop tard. Chaque geste, aussi minime que cela puisse être, doit être dénoncé et porté devant les juridictions compétentes pour des sanctions pénales. [/penci_blockquote]

Des victimes ont été confrontées, dans la majorité des cas, à cette barrière familiale qui les prive de parole, de voix et les laisse dans ce traumatisme qu’elles trimballent presque à vie. Dans un témoignage, une des victimes affirme que l’école était devenue, pour nombre d’apprenantes victimes, des lieux de refuges puisque leurs bourreaux sont à la maison. Ces victimes, poursuit-elle dans son témoignage, ne peuvent même pas donner de la voix puisque personne n’avait voulu les écouter en son temps. 

Mais même si aujourd’hui des institutions et des acteurs des OSC veulent entendre et accompagner les victimes, la barrière du silence familial entrave toujours les efforts. Parmi ces organisations qui militent pour faire entendre la voix des victimes, les médecins du monde. 

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Depuis 2018, l’appui de Médecins du Monde aux trois centres de prise en charge pour les 12 départements du Bénin a dynamisé leur fonctionnement. La fréquentation de ces centres par des victimes a augmenté de manière significative. Les statistiques présentent 729 victimes accompagnées en quatre ans entre 2014 et 2017, 489 victimes en 2018, 622 en 2019 et 814 en 2020. 

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